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Daech et le cinéma

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Dans son essai « Daech, le cinéma et la mort » (éd. Verdier) qui vient tout juste de paraître, le réalisateur, théoricien critique et ex-rédacteur en chef des Cahiers du cinéma Jean-Louis Comolli défend des thèses très fortes : les vidéos de Daech feraient partie intégrante de ce qu’on appelle le cinéma, nous avons pour quasi-devoir d’y jeter un oeil, ses vidéos défont le lien originel que le cinéma a toujours entretenu avec la vie, les blockbusters hollywoodiens assignent le spectateur à la même place que les vidéos de Daech. Thèses avec lesquelles je ne suis pas d’accord et que nous discutons ensemble pendant cet entretien qui dessine en creux la pensée du cinéma de ce membre éminent de la cinéphilie Cahiers.
Ce qui m’a le plus saisie et touchée, c’est de voir le militantisme cinéphilique muter au fil des années : Comolli, dont la bonhomie laisse toute la place à un débat joyeux et animé, semble avoir pris un virage étonnant et que j’ai cru pessimiste dans sa façon de tourner le dos à ce qu’il défendait jadis. Celui qui défendait le cinéma contre les situationnistes, qui n’y voyaient qu’un spectacle aliénant, semble aujourd’hui rejoindre Debord. Le théoricien s’est ainsi tourné vers des formes de cinéma dites minoritaires, et notamment le cinéma documentaire où se trouverait désormais une conception du cinéma non suspectée de jouer le jeu du spectacle. Il prend ainsi pour exemple et nous fait découvrir Abou Naddara, collectif de cinéastes syriens qui publient sur internet leurs home videos d’une Syrie à la fois intime et tragique, d’une Syrie non plus enregistrée par l’oeil aveugle des caméras des journaux télévisés mais bel et bien regardée.
Murielle JOUDET
Le collectif Abou Naddara : https://vimeo.com/user6924378https://vimeo.com/user6924378
4 réponses à “Daech et le cinéma”
Jean-Louis Comolli et Murielle Joudet donnent au mot « blockbuster » un sens très limité, à avoir un film d’action plein d’effet spéciaux. Or, ce n’est pas le sens qu’on lui donne généralement. Un blockbuster est, plus simplement, un film à gros budget conçu pour attirer un maximum de spectateurs, le « gros budget » étant parfois consommé en grande partie – outre la promo et le cachet des acteurs stars – à la réalisation des décors, notamment lorsqu’il s’agit d’un film « d’époque ». L’un des premiers blockbusters est sans doute « Autant en emporte le vent », qui ne contient pratiquement aucune scène d’action.
Beaucoup de propos discutables et d’approximations dans le discours de Jean-Louis Comolli, souvent très agaçant dans ses démonstrations et ses certitudes.
Illustration : il cite le plan du « train qui entre dans le tunnel » du film « La mort aux trousses » comme exemple de la façon dont Hitchcock contournait du Code Hays et il précise « on ne pouvait pas montrer les baisers au cinéma », ce qui est évidemment faux. Le plan du « train qui entre dans le tunnel » est une blague de potache, un plan coquin tous à fait gratuit qui n’apporte rien au film.
En la circonstance, Jean-louis Comolli semble avoir oublié ses classiques et s’emmêle une fois de plus les pinceaux. Le bon exemple qu’on cite généralement est celui de « la scène du baiser » de « Notorious » dans laquelle Hitckcock contourne la règle de la limitation de la durée du baiser, en découpant l’étreinte à l’aide de dialogues :
https://www.youtube.com/watch?v=Zu8JASfWb6A
Notons que ces dialogues sont à double sens, puisque Ingrid Bergman évoque « the cock » (en affirmant qu’elle n’aime pas « the cock » et qu’elle préfère « the chicken », ce dont on peu douter…)Cher Gauthier R,
Hitchcock story-boardait effectivement tous ses films. Mais je suppose que si une bonne idée lui venait en cours de tournage, il ne se privait pas de bafouer le story-board. Si la production du film « North by Northwest » a gardé le story-board du film, il serait d’ailleurs intéressant de le comparer au film fini. En ce qui concerne le plan du tunnel, il n’est pas interdit de penser qu’ Hitchcock en a eu l’idée au montage en visionnant les plans tournés pour la première scène de train (celle où Tornhill fait la connaissance de la belle espionne) ou qu’il a puisé dans les stock-shots du studio.Cher Hubert_Non_Uber,
Vous avez sans doute raison. Mea culpa, donc. Mon interprétation, due à mon esprit pervers et à ma mauvaise connaissance de l’anglais autant qu’à l’accent suédois d’Ingrid, était un peu hasardeuse. Peut-être ai-je également été (obsédé sexuel, vous dis-je) inconsciemment influencé (puisque dans le dialogue Grant-Bergman il est question de bouffe) par une réplique de Laurent Baffie dans « Tout le monde en parle » : à Ovidie, actrice de films X, qui vient de déclarer qu’elle est végétarienne, il fait remarquer que dans plus d’un film, il l’a vue manger de la viande.
Je reconnais que je suis tatillon. Je suis surtout paresseux et, plutôt que d’utiliser des arguments complexes pour mettre en évidence le flou des propos de Comolli, je préfère l’illstrer par une erreur en béton, erreur d’autant plus indiscutable – même si elle n’est en fait qu’un lapsus – que sa phrase « on ne peut pas montrer les baisers à l’écran » est immédiatement suivie par un extrait du film montrant une scène de baiser. Murielle et Raphaël, vous êtes cruels avec les invités! :o).
Les scène de baisers d’Hitchcock sont tellement « cultes » que beaucoup d’internautes cinéphiles en ont fait des compilations. Je vous laisse les retrouver sur YouTube.merci pour vos contributions dans les commentaires
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