Blindtest #15

avec Rémy CARDINALE
publiée le
Vous devez être abonné
pour voir cette émission
animée par Pierre TENNE

Contrairement à ce que nous annonçons en introduction, Diagonale Sonore avait déjà consacré une émission à la musique classique dans un précédent blindtest proposé à Aliette de Laleu, qui explorait la place du genre et du sexisme dans les mondes de ce genre de musique. Rémy Cardinale explore d’autres actualités d’une musique classique en lutte. Ou plutôt, d’une musique romantique dont il défend le potentiel révolutionnaire, historiquement masqué par une réaction bourgeoise néo-classique. Cofondateur de l’ensemble musical marseillais l’Armée des Romantiques, le pianiste plaide en effet pour une interprétation du répertoire romantique qui puise aux sources historiques – sans sacraliser la partition – pour retrouver l’élan incandescent d’une musique dont il dénonce les nombreuses lectures contemporaines, encore tributaires de traditions ayant plus tendu à domestiquer qu’à interpréter ces œuvres du XIXe siècle. 

Au fil du blind test et des évocations qu’il permet, Rémy Cardinale nous introduit dans cette histoire hétérodoxe du répertoire romantique, qu’il a conçu grâce aux travaux du musicologue Michel Faure. Également pédagogue, le pianiste montre dans ces écoutes les équilibres à trouver entre l’écoute, le jeu, la réflexion, la politique, la transmission, pour qu’advienne une musique qui soit socialement située : on la dit bourgeoise, indifférente à son monde, claquemurée, et Rémy Cardinale dénonce tous ces travers (rôle des conservatoires, économie des orchestres et des scènes, du mécénat public ou privé, starification de certains artistes) tout en montrant une voie possible vers une musique romantique et classique débarrassée de son embourgeoisement. Et le sensible? Il est partout, répond le pianiste.

Il serait peut-être mieux partagé dans un monde où la culture se donnerait de façon plus indiscriminée à chacun et à chacune, librement. « Faites-le comme vous voulez, mais faites-le beau! » disait Brahms, cité par notre invité. Ce partage du sensible réside également dans un militantisme au sein du Réseau Salariat, pour l’instauration d’une sécurité sociale de la culture. À partir des réflexions de Bernard Friot, c’est à une forme de communisation de l’art qu’invite le Réseau Salariat, dont Rémy Cardinale présente les ressorts et les potentialités. Faites-le beau et comme vous voulez : un monde commun et libre, dont la musique classique peut aussi, bien sûr, être la bande-son.

Pierre TENNE

wwww.armée-des-romantiques.fr

Durée 103 min.

Une réponse à “Blindtest #15”

  1. J. Grau

    Merci pour cet entretien très intéressant. Les idées exposées ici sont cependant très discutables, me semble-t-il. A tout le moins mériteraient-elles d’être nuancées. Le romantisme, en musique, a parfois fait très bon ménage avec les idées les plus réactionnaires, comme le montre l’exemple de Wagner. Inversement, le mouvement « néo-classique » dont parle l’invité a pu produire des choses très révolutionnaires en musique (comme le montre l’exemple de Debussy) et il n’est pas forcément lié à des idées politiques conservatrices ni à une esthétique élitiste : Ravel était plutôt à gauche, il s’intéressait à la musique populaire de son temps, notamment au jazz, et au moins l’une de ses œuvres, le Boléro, a été très populaire.
    Quant au déclin de certains instruments, il n’est pas nécessairement lié à la révolution française. Déjà du vivant de Bach, la viole de gambe était un instrument en déclin. Inversement, le clavecin a peu à peu laissé place au piano-forte, pour des raisons principalement esthétiques, me semble-t-il, et sa disparation a été si progressive qu’on en trouvait encore au début du 19ème siècle.

Laisser un commentaire

Fermer X