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Culture populaire, culture de masse

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Pacôme Thiellement

Une des premières fois où j’ai vu la tête de Pacôme Thiellement, c’était sur un plateau télé. Il expliquait, devant une Nadine Morano médusée, qu’il ne fallait pas s’inquiéter outre mesure des apéros géants Facebook, parce que le monde était entré dans une phase de dissolution et que, selon la trimurti indienne, nous devions considérer cette pédiode destructrice comme quelque chose de très positif… Nadine Morano, avait vainement essayé de dissimuler son effroi en hochant la tête, et avait fini par conclure quelque chose du genre : « Oui, mais il faut que ce soit encadré !».


J’avais bien rigolé.


J’ai découvert par la suite, qu’en plus de répandre la parole apocalyptique dans mon poste de télévision, Pacôme Thiellement se livrait à un tas d’autres activités tout à fait passionnantes. Certains d’entre vous connaissent déjà sûrement son goût pour l’exégèse des séries télé et notamment celles de Lost ou de Twin Peaks. D’autres ont peut-être eu vent de sa passion pour Frank Zappa, Elvis, ou les Residents. Mais ce qu’il y a de bien avec Pacôme, c’est qu’on peut parfaitement avoir avec lui des discussions vraiment stimulantes, sans pour autant avoir vu tous les épisodes de Lost, ni tous les films de Jacques Rivette, ni connaître par cœur l’ensemble du Corpus Hermeticus ou l’intégralité de l’œuvre de Killofer. Cette heure et quelque passée ensemble n’aura permis d’aborder qu’une toute petite partie des thèmes qui lui sont chers. Il les a d’ailleurs récemment regroupés dans un gros livre intitulé Pop Yoga, qui aurait pu faire une excellente idée cadeau pour Noël. Sauf que Pacôme Thiellement déteste Noël, il préfère Carnaval. Mais je me suis dit qu’un moment avec lui nous aiderait sûrement à faire passer la dinde, le foie gras et tous les autres trucs indigestes qu’on a dû avaler cette année... Bonnes fêtes !

 

En accès libre , émission publiée le 27/12/2014
Durée de l'émission : 88 minutes

Regardez un extrait de l'émission

Commentaires

28 commentaires postés

Deux remarques à la suite de cet entretien passionnant:
- Il me semble que le thème proposé a très vite disparu au profit d'une analyse de la production et du contenu des séries télé. Culture populaire-culture élitiste-culture de masse, j'aurais aimé entendre Thiellement sur ce point un peu plus longuement. La démocratisation culturelle (l'accès pour tous à la création artistique) enclenchée depuis Malraux a bénéficié aux classes moyennes supérieures; la petite bourgeoisie et les classes populaires restent oubliées, soumises au seul matraquage de la communication (c'est l'essentiel de la politique culturelle d'aujourd'hui).

- De plus en plus fleurissent des émissions dites de plateau (ça coûte bien moins cher en ces temps de disettes budgétaires!): quelques personnes de bonne compagnie devisent agréablement de sujets d'actualités,font de la promotion, plaisantent, se coupent la parole, s'interpellent, souvent de façon allusive.. Au mieux le spectateur entend et comprend une petite moitié des propos échangés sur le plateau; pour le reste il est voyeur! Certes ces émissions font de l'audience, mais il me semble(la remarque vaut pour ASI à certains moments un peu chauds!)dommage que le spectateur soit parfois absent du débat. C'est le rôle de l'animatrice de l'y maintenir constamment.
En toute amitié, continuez ce travail essentiel.

Claudo43

Par Paul Claudel, le 26/06/2016 à 18h15

j'ai enfin la réponse à la question : pourquoi les années 60 et 70 ont été si intéressantes artistiquement parlant et pourquoi les années 80-90 l'ont été beaucoup moins? Grazie

Par Salmanitto, le 06/05/2016 à 15h36 ( modifié le 06/05/2016 à 15h36 )

J'aime bien l'espèce d'hippopotame zébré qui acquiesce de la tête à chaque fois que Pacôme fait bouger la table. :)

Par Hassan FINGE, le 09/11/2015 à 06h50

Profitant d'une bonne grippe je regarde plusieurs épisodes en retard. Intéressant, vraiment.
Mais, s'il VOUS plaît! Plus de tutoiement... ça fait faux jeune, ça exclut (moi). Franchement ça me gâche tout...
O

Par Godile, le 22/02/2015 à 23h20

@Cyrilkenyatta

Je vous remercie pour votre réponse. Désolée du temps que j’ai mis à vous répondre moi-même, j’avais fini par penser que personne ne réagirait au commentaire :-)

J’ai lu l’article de Delfeil de Ton dans l’Obs, c’est courageux de sa part de ne pas se laisser intimider par la censure de l’émotionnel. Ca m’a donné envie de regarder le « Aux sources » que Maja a fait avec lui (sur le site d’@si pour ceux qui sont encore abonnés…). Dans les 15 dernières minutes, il dit ce qu’il pense de la façon dont Charlie Hebdo a mal tourné durant la période Val. Il y a un petit documentaire de Pierre Carles - « Charlie Hebdo se fait Hara-Kiri » (http://www.dailymotion.com/video/x6pkma_charlie-hebdo-se-fait-hara-kiri_news ) et une émission de « Là-bas si j’y suis » à partir du travail de Carles qui montre clairement ce qu’a politiquement entraîné la refondation de ce journal par Val (http://la-bas.org/professeur-choron )

Quant à l’article d’Abdennour Bidar, je vous avoue qu’il m’a gênée sur bien des points. J’ai l’impression qu’il reconduit ce que l’on pouvait déjà trouver sous la plume d’écrivains comme Abdelwahab Meddeb, c’est-à-dire l’idée que le monde musulman serait atteint d’une « maladie », qu’il serait sorti de l’histoire, qu’à cause de cette « pathologie », il serait voué à porter atteinte aux femmes, à la démocratie, aux libertés, etc. Ce que j’y vois, c’est de l’essentialisation (même s’il se réclame des « Lumières », de la philosophie… mais un peu comme de cautions je trouve). La naissance de l’Etat islamique a tout à voir avec le long pourrissement politique et social du Moyen-Orient au vingtième siècle (événements dont vous parlez dans votre commentaire), et, selon moi, rien à voir avec la religion. Sermonner le « monde musulman » comme un adolescent à problème qu’il faudrait mettre devant ses « responsabilités », c’est selon moi, essentialiser, culturaliser et psychiatriser un problème qui ne devrait pas sortir d’un cadre d’analyse strictement politique et historique, rétablissant « ce monde » dans ses temporalités et sa très grande diversité géographique. Même s’il écrit plus calmement et avec empathie, à mes yeux, son discours ne l’éloigne pas de ce qu’a pu dire A. Finkielkraut ou C. Fourest. C’est, en tout cas, la lecture que j’en ai faite... :-) C’est intéressant de voir qu’il a connu une si large diffusion et un écho globalement positif sur le net, merci beaucoup de me l’avoir fait connaître :-)

Par Alexandra, le 23/01/2015 à 13h32 ( modifié le 23/01/2015 à 13h38 )

@Alexandra : Merci pour ce lien vers le texte de Pacôme Thiellement. Je ne partage pas à 100% son point de vue, ne serait-ce que sa façon de rejeter TOUTE la faute sur l'Occident, même si elle est énorme (il faudrait d'ailleurs remonter à bien plus loin dans le temps : la tentative de déstabilisation par la France, le Royaume-Uni et Israël de Nasser au moment de la "crise du canal de Suez" ou le coup d'état américano-britannique pour remplacer Mossadegh par le Chah en Iran). Il faut croiser cette analyse avec les problèmes inhérents à l'Islam politique, formidablement décrits par Abdennour Bidar dans cette lettre ouverte que je trouve admirable (et écrite AVANT les événements de la semaine dernière) : http://quebec.huffingtonpost.ca/abdennour-bidar/lettre-au-monde-musulman_b_5991640.html.
Mais le texte de Thiellement est d'autant plus intéressant et précieux qu'il est écrit par quelqu'un qu'on ne peut certainement pas soupçonner d'être opposé par principe à l'humour, la dérision et l'irrévérence. Je trouve qu'il rejoint d'ailleurs la chronique très forte écrite par Delfeil de Ton (l'un des fondateurs d'Hara-Kiri puis Charlie Hebdo) dans L'Obs de cette semaine.

Je revoyais hier soir "La Désintégration", sorti dans un trop grand anonymat en 2012 (même pas 10 000 entrées en France, quelle misère et quelle honte...), inspiré du destin de Zacarias Moussaoui. Ce film de Philippe Faucon est parfait pour comprendre le cheminement idéologique de beaucoup de moujahiddins. Je le recommande chaudement à tous et me désole que, à ma connaissance, aucune chaîne de télé ne l'ait diffusé depuis huit jours.

Par cyrilkenyatta, le 16/01/2015 à 10h21 ( modifié le 16/01/2015 à 10h23 )

Comme cela a été rappelé dans l'entretien avec Maja, Pacôme Thiellement a écrit un essai (que je n'ai pas lu) sur la fin du Charlie Hebdo de l'époque Choron. Comme j'ai beaucoup aimé l'entretien, qu'il m'a fait découvrir P.T. que je ne connaissais pas, je me suis souvent demandée, depuis une semaine, ce qu'il aurait dit de tout ce qui arrive.

Il vient juste d'écrire un texte qui est asséné comme un coup de poing mais qui, selon moi, n'en est pas moins terriblement juste (et très culotté compte tenu de la difficulté qu'il y a à écrire en ce moment tout ce qu'il y écrit) :

"Nous sommes tous des hypocrites. Bienvenue dans un monde de plomb" : http://lmsi.net/Nous-sommes-tous-des-hypocrites

Je le poste ici en me disant que vous ne serez sans doute pas tous d'accord avec ce qu'il écrit, mais que ça devrait vous intéresser de le lire, et que malgré la gravité du sujet et la passion qui anime P.T. dans ce texte, la confrontation des idées se passe en générale bien sur HS :)

Par Alexandra, le 13/01/2015 à 06h27 ( modifié le 13/01/2015 à 06h51 )

d'accord avec Anthony, malgré la grippe qui me cloue sur le canapé, je me suis régalée!

Par Laurine Defond, le 06/01/2015 à 18h13

Dans la forme et dans le fond : cette émission est un vrai régal. Merci Maja.

Par Anthony, le 06/01/2015 à 07h01

Dean Martin disait: "Tant qu'on peut rester allongé sur son lit sans s'accrocher, c'est qu'on n'est pas vraiment bourré..."
Nick Tosches a fait sa bio, "Dino"...
C'était sous-titré: "La belle vie dans la sale industrie du rêve" !!! On n'est pas loin de votre sujet... La sale industrie du rêve...
P.Thiellement, me semble-t-il, prolonge ici, avec beaucoup de subtilité le travail de ces fameux critiques américains de la culture populaire (américaine), les Nick Tosches, Greil Marcus...
Fort intéressante émission.
Quant à l'éxégèse, chère Maja, laissez tomber. Y a plus rien à exégéter! Ni les JT, ni quoi que ce soit. Vous risqueriez de vous salir.

Par felix d, le 03/01/2015 à 14h53

Ce type est passionnant. J'oublierai presque tout de ce qu'il a raconté parce que, bon, ça allait vite et c'était parfois un peu flou. J'ai pas vu l'émission d'@si sur les séries, mais j'ai bien peur que ce ne soit plus plus nécessaire. Et puis, Maja et lui, ça résonnait!

Par Robert., le 02/01/2015 à 22h53

Assez d'accord avec cyrilkenyatta, ça manque de rigueur et de définitions nécessaires à l'élaboration d'un espace de discussion, là on a l'impression d'assister à la conversation de deux personnes qui se comprennent plutôt moins que plus et que ça n'a pas l'air de déranger. Ça fait partie pour moi du principal défaut des émissions les moins critiques justement (celles de Murielle avec Rauger ou Uzal, dans ce cas dernier on finissait l'émission sans définition du naturalisme, ce qui était très gênant), quant à Jullier en effet, je trouve sa position faible, mais l'argumentaire de MJ était si fragile en face que j'en aurais presque rejoint LJ. Qu'est ce que la culture pop ? Qu'est ce que le naturalisme ? Qu'est ce que la cinéphilie ? On est moins avancé après avoir vu les émissions avec Thiellement, Uzal ou Rauger qu'avant.

Par johnmellor, le 02/01/2015 à 16h23

tout ceci donne vraiment envie d'une 6ième émission récurrente (on peut rêver) : Dans la série ! Besoin d'analyses, d'entretiens, de réflexions autour de ce qui apparaît de plus en plus comme un des arts importants de notre époque.

Par gomine, le 02/01/2015 à 12h42

Entretien très intéressant. La référence à Poe pour contrer l'argument qu'une littérature anxiogène ne mène pas forcément à une vision sécuritaire du monde me semble assez mal choisie : Poe à l'instar de Lovecraft était conservateur voire réactionnaire sur le plan politique. Plus adapté me semblerait l'exemple de Stephen King, producteur d'une littérature anxiogène au même titre que Poe mais progressiste sur le plan politique, notamment dans son engagement contre la vente des armes à feu.

Pour ce qui est de l'opposition entre séries françaises formatées et relativement inintéressantes et des séries américaines plus ambitieuses, il me semble qu'on ne peut faire l'impasse sur la compréhension des structures économiques de production parfaitement analysées par Sébastien Martel dans Mainstream. A un système centralisé à la française, versant culturel du jacobinisme, où les décisions viennent d'en haut, s'oppose une politique américaine de sous-traitance où les grands studios n'ont plus une politique de création mais se contentent d'un rôle de producteur et de diffuseur. Force est de constater également que le marché n'est pas le même et que les prises de risque ne sont pas du même ordre dans les deux pays. Pour que les conditions de production soient équivalentes, il faudrait considérer les créations culturelles non plus à l'échelle de la France, mais à celle de l'Europe. Ce qui, comme pour l'aspect politique, n'est pas encore fait.

Par David , le 02/01/2015 à 11h15

Merci Maja, merci Pacôme pour cette bonne humeur et ces 90 minutes de complicité éclairée sur la culture pop.
Je me suis évidemment reconnu dans ce scénariste interviewé par Rafik, en lutte contre les "fantômes" de Médiamétrie.
La métaphore est belle: c'est vrai qu'on pouvait lutter contre les censeurs d'hier... beaucoup plus difficile de lutter contre les "fantômes" d'aujourd'hui!
Autrement, j'adore cette chanson de Dean Martin et les comédies romantiques des années 80, 90!
A chacun sa part de ténèbres! :-)

Par Marc Herpoux, le 31/12/2014 à 01h28

@ cyrilkenyatta : c'est vrai..., peut-être est-ce une contradiction de sa part, je ne sais pas. En tous cas concernant l'exégèse, mettre en avant la réception, ce n'est pas forcément ignorer l'intention des auteurs ou producteurs, plutôt valoriser affirmer l'intelligence du regard, l'intelligence des spectateurs (ce que ne font pas les producteurs de la culture supposée de masse) et laisser chacun d'entre nous, peut être éternels commentateurs mais aussi co-créateurs, co-producteurs du sens des oeuvres. Je trouve que ça fait du bien ce genre de discours, qui est l'anti cynisme, qui ne prend pas les gens pour des cons consommateurs.

Par gomine, le 30/12/2014 à 19h13 ( modifié le 30/12/2014 à 19h14 )

Un bon entretien. Pas fan de toutes les questions et objections de Maya (notamment celle sur True Detective), néanmoins j'aurais aimé savoir la différence, ou du moins la filiation possible, entre la méthode exégétique de Pacôme Thiellement, et l'esthétique de la réception, telle que pensée par Aristote, puis théorisée et défendue par HR Jauss dans son ouvrage éponyme. Je n'ai pas réellement saisi de différence dans l'idée que l'oeuvre s'actualise, se complète, par le récepteur, dont l'attention active est requise, et ce que défend Pacôme Thiellement. Il aurait été intéressant de plus développer ce processus interprétatif.
Mais le tout était vraiment d'une très bonne tenue. Je m'en vais lire son ouvrage sur Twin Peaks.

Par Jamel Benhassine, le 30/12/2014 à 19h05

@gomine : certes... Le problème est que le même Pacôme Thiellement, pour disqualifier ce qu'il considère, lui, comme étant de la "culture de masse", n'utilise qu'un seul argument : le cynisme de ses producteurs, qui n'aimeraient pas ce qu'ils vendent au public. Que fait-il d'autre ici qu'"aller chercher du coté de l'intention" ?...

Par cyrilkenyatta, le 30/12/2014 à 18h41

"chaque oeuvre a besoin de toi, profondément, a besoin de ton regard à toi pour se constituer", tellement juste ! Tellement plus intéressant, toujours, pour les significations (plurielles) d'une oeuvre d'aller chercher du côté de sa réception plutôt que du côté de l'intention.
ça fait du bien, cette rencontre,
puis aussi : parfois il y a une belle lumière sur Maja.

Par gomine, le 30/12/2014 à 18h34

Sincèrement , il m'agace.
Ses convictions , si elles sont susceptible éventuellement de présenter un quelconque intérêt , ne sont basées que sur sa capacité à construire une cohérence pour les justifier. Mais après 21:01, je n'ai encore entendu aucun argument justifiant , expliquant ses constructions qui puisse m'attirer vers ses convictions au contraire. L'opposé total de l'entretien avec bricqmont que , par ailleurs contrairement à d'autre non seulement ne m'avait pas agacé mais mais interessé sinon conquis.
A plus

Par Bartho., le 30/12/2014 à 08h58

@cyrilkenyatta: Il rôde rue JPT (le pressing au Rûmi). Tout est dit.

Par Sebastien Lemar, le 29/12/2014 à 16h51

Il est très intéressant,a un joli esprit mais un rire hystérique insupportable. D'où cela peut il venir ?!!! Dommage, ça gâche son propos. Pour lui comme pour nous. Ca m'a beaucoup gêné. Peut-être anecdotique mais bon voilà, un malaise ressenti pour moi. Bise Maja, toujours excellente.

Par Annie HUET, le 28/12/2014 à 19h58

très bon entretien, magnifiques Maja et Pacôme ;)

Par Compunet, le 28/12/2014 à 17h21

Très intéressante émission !

Pour ceux qui en redemanderaient il y a aussi l'excellente interview de lui dans la défunte émission d'arrêts sur images "Au prochain épisode" visible ici : https://www.youtube.com/watch?v=-Ox0hm9r3Z0

Par Daniel Ristic, le 28/12/2014 à 16h28

excellentissimo

Par bernejo, le 28/12/2014 à 15h08

Je dois être un peu monomaniaque mais, en regardant cet entretien plein de bonne humeur (rien que ça, ça fait du bien), je n'ai pas pu m'empêcher de penser à Laurent Julier...
A la fois parce que, à la fin de l'entretien, Pacôme Thiellement insiste très justement sur le fait qu'une oeuvre s'enrichit considérablement du regard de ses spectateurs (ou auditeurs) et n'est donc pas le seul fait de son auteur (il cite Borges citant le cas d'Hamlet).
Mais aussi parce qu'il me semble qu'il y a, dans les séparations (que je n'ai pas toujours trouvées très claires) qu'il effectue entre cultures populaire, académique et de masse, tout le poids de ses propres (dé)goûts personnels, tout à fait estimables, mais qui lui sont propres. Et, en même temps, pas si propres à lui-même que ça... C'est un terrain sur lequel Maja tente à un moment de l'emmener quand elle lui fait remarquer que certaines de ses marottes (je pense à Zappa, les Residents, Burroughs, Pynchon ou d'autres encore bien plus confidentielles) relèvent d'un certain "élitisme", voire même d'un certain snobisme. Et le goût pour des oeuvres ou des genres beaucoup plus triviaux et généralement rejetés par les tenants de la "culture savante" (ou académique), comme, ici, le cinéma d'horreur, la pop music la plus universelle qui soit (Elvis, les Beatles...), Hara-Kiri, les séries tv, etc., va souvent de pair avec des goûts plus élitistes. Comme si ces deux facettes devaient provoquer un équilibre ("vous voyez bien que j'aime des choses exigeantes / vous voyez bien que je ne suis pas snob et aime les mêmes choses que tout le monde !") ; comme si, en tout cas, comme pour tout un chacun qui met beaucoup de lui-même dans ses préférences culturelles (et dieu sait si c'est son cas !), il s'agissait à chaque fois d'une stratégie de "distinction" sociale (pour reprendre la terminologie de Bourdieu).

Je ne doute pas de la sincérité de Pacôme Thiellement dans ses goûts passionnés pour des représentations culturelles aussi éclatées. Je trouve dommage qu'au lieu de les revendiquer comme personnelles, il s'efforce d'essayer de les justifier par des considérations supposées plus "objectives". Ainsi, sa définition de ce que serait la "culture de masse" ne me paraît pas du tout convaincante. Là, encore Maja a raison de lui opposer le cas de Presley. Répondre, comme le fait Thiellement, que ses enregistrements pour les studios Sun ne pouvaient pas relever de la culture de masse puisque rien de tel ne préexistait et qu'ils ne pouvaient donc pas s'asservir au marketing, ce n'est pas faux en soi mais c'est de la pure mauvaise foi. Sur ses 23 ans de carrière discographique, Presley n'a enregistré pour Sun que pendant un an et demi et (sauf erreur de ma part) cinq 45 tours (fondateurs, certes, mais ça ne fait pas beaucoup). Que l'on continue à l'aimer ou pas à partit de ce moment-là, lorsqu'il tombe sous la coupe du fameux "Colonel Parker" en 1956 et signe chez RCA, Elvis Presley devient sans doute le premier exemple concret de phénomène culturel de masse produit avec l'embryon des méthodes marketing que l'on ne connaît que trop bien aujourd'hui.
Je fais l'hypothèse que si Thiellement "sauve" Presley (et je le sauve avec lui) et en fait de la culture "pop" et non "de masse", c'est parce que ça LUI PLAIT (pour toutes sortes de raison). Et ça fait toute la différence...

Par cyrilkenyatta, le 28/12/2014 à 11h31 ( modifié le 28/12/2014 à 11h31 )

Parfait!

Par Baptiste GAUBERT, le 28/12/2014 à 01h58

En tout cas une émission qui donne le sourire. Merci !

Par Abracadabra, le 27/12/2014 à 22h17