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La face cachée du numérique

Aux Sources

Guillaume Pitron

Vous êtes-vous jamais demandé où sont stockées les vidéos de votre petit neveu reçues sur le groupe WhatsApp familial ? Et vos photos personnelles, qui étaient autrefois conservées au chaud sur le disque dur de votre ordinateur ou, lorsqu’il était plein, sur un disque dur externe ? Tout ça est désormais dans le cloud. Mais qu’est-ce que le cloud ? Le mot – traduction anglaise de nuage – suggère que toutes ces données flottent quelque part au-dessus de nos têtes, dans un espace éthéré, immatériel. Détrompez-vous ! Vos données sont bien stockées sur la terre ferme, dans l’un des trois millions de datacenters installés sur notre planète. Ces centres de stockage, qui font parfois la taille d’une armoire, peuvent mesurer jusqu’à… 110 terrains de football ! Ils constituent l’envers du monde numérique, lequel consomme environ 10% de l’électricité mondiale et génère 4% des émissions de CO2.

Les GAFAM et leurs armées de communicants s’évertuent à répandre l’idée que le numérique constitue un monde immatériel, dénué d’effets sur les écosystèmes. Pourtant, les photos de votre Iphone sont dupliquées dans deux datacenters (au cas où l’un d’eux tombe en panne, il ne faudrait pas que vous passiez 24h sans pouvoir accéder à vos souvenirs de vacances). Et votre messagerie Gmail est stockée… dans sept endroits différents (sait-on jamais !). Comme les datacenters ont besoin d’être refroidis en permanence (sous peine de surchauffe), tous ces gigaoctets entrainent une fantastique gabegie d’eau.

Et encore, on s’en tient là au stockage des données. Que dire des métaux rares qui se trouvent dans les puces de nos appareils électroniques, au prix de ravages environnementaux à peine concevables ? Que dire des mines de charbon nécessaires à notre consommation électrique ? Des câbles sous-marins qui jalonnent le fond des océans afin de satisfaire notre désir d’une connexion toujours plus rapide et de répondre aux exigences du trading à haute fréquence ?

Bref, vous l’aurez compris, le lien entre le numérique et l’écologie est bien moins naturel qu’il n’y paraît. Certes, la puissance de calculs des derniers ordinateurs permet de de surveiller l’apparition des feux de forêts et de réguler plus intelligemment le trafic routier. Les réseaux sociaux permettent aux activistes climatiques de mieux s’organiser. Les ordinateurs permettent de consommer et travailler sans emprunter notre voiture. Mais il y a l’envers du décor, que mon invité, le journaliste Guillaume Pitron, décrit à merveille dans son livre L’enfer numérique. Voyage au bout d’un like (Les Liens qui Libèrent), fruit d’une enquête de deux ans sur quatre continents. Et comme les recherches sur l’impact écologique (bénéfique ou négatif ?) du numérique sont quasi-inexistantes, les spéculations vont bon train. Pour y voir plus clair sur nos modes de vie numérique et sur les enjeux écologiques et géopolitiques qu’ils charrient, cette émission est à votre disposition.

Bon visionnage !

Manuel Cervera-Marzal

 

Aux Sources , émission publiée le 06/11/2021
Durée de l'émission : 71 minutes

Regardez un extrait de l'émission

Commentaires

5 commentaires postés

D’accord avec Patrick Dessart, un entretien majeur qui se devrait d’être public.

Par ERIC DOKHAN, le 18/11/2021 à 15h03

Bonjour,
Suggestion : vu l'utilité publique de cette émission, ne la mettriez-vous pas en accès libre ?
atrick

Par Patrick Dessart, le 08/11/2021 à 17h35

Bravo! très riche entretien.

Par François Leroux_1, le 06/11/2021 à 21h52

Je ressors en "pleine forme" après cet entretien où les deux intervenants nous disent que la crise pandémique est sur le point de se terminer ! (Nous n'en sortirons au mieux qu'après le élections et d'après la loi votée au 31 juillet prochain.) GP aime la société de surveillance qui lui permet de se déplacer avec son code : grand bien lui fasse! Très intéressant de croire que l'UE va infléchir sa politique dans ce domaine: il est bon de rêver: L'UE est une création US très réussie(lire Annie Lacroix-Riz) puisqu'elle n'a aucun poids géopolitique propre , c'est la serpillère des USA.: l'exemple des sous-marins vient de nous le rappeler récemment.Il est vrai que GP est partisan du capitalisme croissanciste et n'envisage pas de réduire sa consommation d'énergie; pour quelqu'un qui apporte des connaissances importantes sur les dégâts du numérique , on aurait pu envisager une autre fin! Son anti-chine est dans l'ère du temps et la Chine assume de ne plus faire partie des satellites US.
On peut espérer qu'à la lumière des derniers développements aux USA (article de Newsweek), on puisse avoir prochainement un entretien pour parler de la COVID sociologiquement parlant.Eclairer dans ce domaine ne serait pas un luxe à l'heure de la censure régnant sur les réseaux sociaux et sur Mediapart qui il est vrai est un soutien actif de l'impérialisme US: les lecteurs auront noté qu'aucun états-unien n'était impliqué dans les Pandora Papers .
Avec des écrivains comme GP nous irons plus vite dans le mur hélas...

Par titou, le 06/11/2021 à 20h46

C est "écrasant" cette technologie ou rien ne semble pouvoir l'arrêter.

Par Maunoir Charbonnel, le 06/11/2021 à 19h45