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Reprendre le pouvoir ?

Aux Sources

François Boulo

Émission conçue et animée par Wissam Bengherbi

Sommes-nous condamnés à la catastrophe, qu’elle soit environnementale, économique ou autoritaire (ou les trois à la fois ?), ou avons-nous encore la possibilité de « reprendre le pouvoir » et opérer un virage à 180° ? Si l’on en croit François Boulo, il n’est pas encore trop tard, mais le temps presse. Il presse d’autant plus que la tâche s’avère immense. Car l’avocat de Rouen se montre particulièrement critique envers le niveau du débat politique actuel, autant dans la sphère médiatique mainstream que militante. Raison pour laquelle il faut, d’après lui, repartir de la base, c’est-à-dire participer à la formation politique et théorique des citoyens pour leur livrer les clés d’analyse du système néo-libéral qui nous régit. C’est ce à quoi aspire son « manuel d’émancipation politique ».


A travers un langage volontairement pédagogique et accessible, il entend déconstruire les dogmes néo-libéraux rabâchés partout et pointer du doigt les barrières institutionnelles empêchant toute politique alternative, l’Union Européenne étant l’antagoniste principal. Tout comme le ton, l’orientation idéologique de François Boulo se veut claire : l’économie est la pierre angulaire de tout. Le combat doit se mener sur ce terrain. Un brin économiciste, teinté de « citoyennisme », il est convaincu qu’il est absolument nécessaire de chercher le consensus pour rassembler le plus grand nombre, quitte à arrondir les angles et éviter les problématiques trop clivantes. Raison pour laquelle il refuse le clivage gauche/droite, mais aussi d’utiliser certains termes qu’il juge trop marqués. Un choix entraînant forcément des points aveugles et des compromis.


François Boulo s’en défend, il se veut pragmatique et anti-sectaire, ce qui le conduit à ne pas prendre de position qui paraisse trop radicale pour ne pas courir le risque de faire fuir et échouer à unir la majorité des citoyens français, seule possibilité de changement. Certains pourraient alors mettre en doute la pertinence de recevoir un invité que l’on peut trouver trop « tiède ». Mais réfléchir ainsi serait ne pas saisir ce que représente François Boulo. Il est une illustration de ces très nombreux militants Gilets Jaunes qui se sont peu à peu dirigés sur la gauche de l’échiquier politique. Il en vient aujourd’hui à défendre une position véritablement sociale-démocrate, dans la lignée d’un Thomas Piketty. Il est donc nécessaire de replacer ses positions par rapport à son parcours personnel mais aussi au contexte plus général de politisation des Gilets Jaunes. C’est seulement à partir de cette perspective que nous pouvons comprendre l’intérêt que nous avons à dialoguer avec F. Boulo, l’objectif pouvant être de consolider voire radicaliser le processus de « gauchisation ».


Car, comme il le note lui-même, sa réflexion n’est pas arrêtée. Il est en constante interrogation, cherchant à se former et s’informer pour parfaire son éducation politique. Si l’on ne partage pas forcément les mêmes avis sur les modes de lutte préconisés, tirés en grande partie de son rejet d’un combat politique basé sur un rapport de force trop conflictuel, il nous faut admettre que nous pouvons trouver de nombreux points d’accord sur le système néo-libéral qui nous gouverne. Quant à ses angles morts, en particulier la question de la race – point qui a fait énormément débat lorsque certains se mettaient à rêver d’une « convergence » entre les Gilets Jaunes et les « quartiers populaires » -, François Boulo reste dans une position humble et honnête : elle fait partie de ces problématiques qu’il a encore trop peu étudiées. Raison pour laquelle elles peuvent paraître passer à la trappe, se coupant malheureusement des problèmes d’une partie non négligeable de la population. Le constat pourrait être le même du côté des problématiques féministes, totalement absentes de ses écrits. Cependant, rejeter ces thématiques du côté du « sociétal » en arguant que la priorité est le « social » ne nous paraît pas être le meilleur moyen d’unir, sauf si l’on se concentre seulement sur une partie des citoyens. Nous pouvons alors espérer que la discussion ait pu le motiver à en savoir plus, et que son cheminement intellectuel soit enrichi par des lectures théoriques et politiques permettant de penser un projet d’émancipation politique qui prendra en compte tous les opprimés, et ce, dans une perspective radicale.

 

Wissam BENGHERBI

 

Aux Sources , émission publiée le 17/07/2021
Durée de l'émission : 87 minutes

Regardez un extrait de l'émission

Commentaires

14 commentaires postés

Bernard Friot se méfie de l état et propose des collectifs qui ne dépendent pas de l état.

Par ANDRE GUERINEAU, le 26/07/2021 à 17h52

Les bourgeois ont mis 4 siècles pour mettre les institutions capitalistes en place. Ils ont remplacé les institutions aristocratiques par leurs propres institutions capitalistes finalisées politiquement par la révolution de 1789.
Les 4 institutions capitalistes :
Le marché du travail
La propriété lucrative
La mesure de la valeur par la durée du travail
Le crédit

Celui à qui vous demandez la charité vous baissez la tête devant lui, vous ne pouvez pas le tutoyer, vous ne pouvez pas lui imposer des regles (pris sur un interview de Fatou Diome)...alors pensez à toutes les aides que nous octrois la droite et la gauche capitaliste (les socialiste entre autres). Plutôt que s en contenter ou d en réclamer plus reprenons l agenda révolutionnaire interrompu en 1980 par Mitterrand et les socialiste et poursuivi depuis par les gouvernements successifs.
Réclamons le salaire à vie payé par des cotisations salariales prélevées par des caisses gérées par des collectifs publics à but non lucratif (ou ne sera pas présent l état), prenons la propriété d usage du poste de travail. Pour la création d entreprises donnons des subventions et non des prêts. Supprimons tous crédits.....

Par ANDRE GUERINEAU, le 26/07/2021 à 17h02

Bonne émission ou on retrouve François Boulot plus que jamais très motivé. J'ai lu son petit livre précédent je trouve que l'homme est fédérateur innovent, je n'ai pas bien compris ou il mettait la question du réchauffement climatique. Pour le reste je le suis... Un bémol sur ses invitations ( ou il semble vigilent quand même) c est la question de l’instrumentalisation.

Par Maunoir Charbonnel, le 24/07/2021 à 17h58

Je pense que François Boulo a l’honnêteté de décrire son parcours politique, de reconnaître ses erreurs et de comprendre que l'apprentissage politique ne se termine jamais. Après son formatage familial, éducatif, médiatique, c'est par l'expérience du terrain qu'il s'est posé des questions, qu'il a souhaité comprendre (la politique, l'économie) pour enfin avoir ses propres idées. J'ai un parcours finalement similaire, et on a tous beaucoup de mal a avouer ces années d'errances, d'incompréhensions et (souvent) de mauvais choix.

C'est ce côté "monsieur tout le monde" (sans être péjoratif) qui je crois est intéressant. Son inculture politique originelle, son soutient au mouvement des gilets jaunes font qu'on peut l'écouter et le lire. Il constate ce que tout le monde constate au fond, que notre société ne fonctionne pas et qu'il faut la transformer. Mais il le formalise simplement, sans œillère, sans a-priori. Pour beaucoup ce sera un énième livre sur le sujet, ce que disent depuis longtemps (et sans doute mieux) Frederic Lordon ou Bernard Friot, mais lui comprend qu'on ne fera pas de révolution, de changement sans s'élargir d'avantage le mouvement. Il veut s'adresser aux autres. J'aime quand il parle "d'archipels", de communautées sans lien. Commençons par nous écouter, nous avec nos différences, nous qui avons tous LA solution. On a tellement de mal avec la convergences des luttes, nous dans nos chapelles respectives.

Bref, une synthèse (économique, sociale) plutôt intéressante, des méthodes qu'on peut ne pas partager, mais qui me semblent pertinentes.

Par Jean-Philippe Barbier, le 24/07/2021 à 14h50

évoquer les derniers discours progressistes de Biden
s'est bien. Reconnaître, en la matière, l'antériorité des propos, ET DES ACTIONS du président Trump, ce serait mieux.
Ne pas évoquer les difficultés actuelles de Biden, qui pourrait expliquer ces récents propos (comme purement opportunistes)
c'est vraiment dommage !

Par pascal néel, le 22/07/2021 à 17h05

François Boulo!

Quel bonheur de vous entendre! Quel splendide travail vous faites!
Permettez-moi cependant, à mon tour, de vous "faire gagner du temps".

Je sais, cette entrée en matière sent fort la pente savonneuse. Elle peut passer pour pédante, tendancieuse, prétentieuse...
Où alors, c'est peut-être pire, critique, pernicieuse, accusatrice...

J'espère bien que, m'ayant lu, vous ne me classerez dans aucune de ces deux catégories. Je voudrais juste, très immodestement, vous transmettre
une recette. Ma recette pour trancher le "nœud gordien" que représente la croissance (tant qu'elle est vue à la fois comme préalable vital et comme dérive toxique).
J'espère secrètement que vous la ferez votre, bien sûr.

Votre parcours intellectuel -- sur les questions économiques -- me parle beaucoup. Il me renvoie, sans fausse modestie, au mien-même... avec trente ans de retard (eu égard à mon âge). En la matière je suis, comme vous, largement autodidacte, comme vous, j'ai commencé par penser, et voter à droite (moi, c'était pour Giscard en 81!) et si le "catalyseur" de votre éveil a été le quinquennat de Sarkozy, le mien relève essentiellement du premier septennat de Mitterrand... ça donne une certaine avance, vous en conviendrez.

En fait, ma recette n'est pas la mienne. Elle m'a été soufflée par Bernard Friot. Pour lui, comme vous le savez, l'écueil, c'est la propriété lucrative. La solution qu'il prône, le public l'a résumée et rebaptisée sous l'appellation de "salaire à vie". Je ne vous apprend rien.

Là où il répond au dilemme de la croissance, c'est quand il développe son raisonnement. En passant d'une "monnaie-dette" à une "monnaie-salaire", on refonde complètement le calcul de la croissance. Dès lors, pour caricaturer, toute activité humaine "matériellement utile" serait prise en compte. La croissance est alors directement induite par la croissance démographique de la population en capacité de produire du "travail concret"...

L'erreur commune, c'est de réduire la "croissance économique" ( phénomène >>) à la seule "croissance des revenus de l'investissement capitaliste" ( phénomène confiscatoire, découlant de la rémunération de la propriété lucrative, et développant des retombées toxiques).

Dès que je suis sorti de cette impasse, tout s'est éclairé pour moi ! La "croissance" n'était plus un problème, et prôner la "décroissance" m'apparaissait un écueil thanatique. Estimez-moi heureux, si j'ai pu nourrir un peu votre réflexion.


Par pascal néel, le 22/07/2021 à 16h00

Excellente émission, comme d'habitude. François BOULO est un sage qui a bien compris que si on veut changer le Monde, il faut à la fois pratiquer l'interculturel et adopter la stratégie du cheval de Troie. Il est très cohérent, à la fois sur le fond (projet économique et politique) et sur la forme (rassemblement autour de valeurs et d'intérêts communs : équité fiscale, juridique, démocratie). Je pense qu'il a tout à fait raison de dire que l'inconvénient majeur de la radicalité, c'est qu'elle est clivante et que ce n'est pas comme cela qu'on pourra reconquérir le pouvoir. Pour une fois, c'est quelqu'un qui propose humblement une méthode soutenue par une éthique (développement de son savoir, bienveillance et priorité des intérêts du collectif sur ceux de l'individu) et c'est tout à son honneur. Merci encore pour vos choix d'invitations, ils sont toujours très pertinents eu égard à la situation actuelle. Amicalement.

Par Barbara DROUOT, le 22/07/2021 à 10h41

Assez convenu, bien qu'on puisse le féliciter pour sa progression.

Les discours de Friot/Lordon, c'est autre chose ! Bien qu'aussi inefficaces ! Qui veut être réellement maître de sa vie maintenant ? Nous sommes quelques-uns, mais si peu. La société du spectacle a bien joué son rôle...

Par Aubépine, le 20/07/2021 à 13h01

Avec un niveau d'analyse politique aussi bas et remplis de platitude, on imagine l'ego de cette personne qui a estimé que sa pensée merité un livre + une chaîne youtube.
Nous assistons en direc à un bourgeois qui tente de transformer son capital mediatique en capital financier tout simplement.
Je salue néamoins l'ouverture d'esprit en invitant Mr Boulo mais il dois être possible d'inviter des intellectuels de droite un peu mplus pertinant.

Par Karim El Majri, le 19/07/2021 à 14h10

Excellente prestation, argumentée, cohérente; et je ne comprends donc pas les commentaires
Continuez monsieur Boulo. Vous êtes une belle personne.
L'interview est par ailleurs bien menée car les questions sont posées sous un autre angle et donc pertinentes même si je ne les partage pas forcément.
Merci

Par Danièle Huet-Garnier, le 19/07/2021 à 12h42

Impression toute personnelle : je ne sens pas dans ce discours quelle est l'aspiration profonde – s'il y en a une –, sur le plan politique, social. On perçoit bien une défiance de l'élite néolibérale qui capte les richesses et le savoir, et donc un projet de revanche, mais dans quel but, ce n'est pas très clair. Pas vraiment l'émancipation individuelle. Une idée force revient souvent : rassemblement. Autour de quelles valeurs ? Ce qui émerge surtout c'est le souverainisme, et une idée de bienveillance, d'effort de compréhension de l'autre, il faut peut-être entendre de tolérance, à l'intérieur de ces frontières-là, celles de la France, semble-t-il, dont il serait bon d'être fier à nouveau. S'il fallait résumer, je dirais : un discours rassembleur, peu approfondi, pour ratisser large.

Par René THIBAUD, le 17/07/2021 à 23h53

F. Boulo met en cause les politiques. Ok, pour ceux qui ont déjà été au pouvoir. Pourquoi passer sous silence une opposition qui fait un excellent travail, y compris d'éducation populaire qu'il propose lui-même. Je ne parle pas de celle de droite ou d'extrême droite, mais des 18 députés de la FI. Comme l'écrit Titou, dans 9 mois il faudra voter. Reprendre le pouvoir dans 10 ou 15 ans, lorsqu'il aura terminé son oeuvre d'éducation des masses, il sera trop tard. La reprise du pouvoir ne se fera de toutes les façons que par les urnes. En ne prenant pas position pour le programme l'AEC, comme beaucoup d'intellectuels qui se disent de gauche, il porte une lourde responsabilité.
Je viens de repérer une intervention qui pose problème : "on nous impose des candidats dont on ne veut pas". L'analyse des programmes devrait faire parti de son éducation populaire ;-)

Par jacques soyer, le 17/07/2021 à 23h07 ( modifié le 18/07/2021 à 00h13 )

Comme tous les français il parle de lui-même. Il a eu l'occasion lors des gilets jaunes d'apparaitre sous une forme de consensus partagé des gilets jaunes de Rouen. Il devient peu peu une personne politique qui vient de loin et qui a encore du chemin à faire!
Le souci , c'est que quoi que l'on pense , il lui faudra mettre un bulletin dans l'urne (ou pas)l'an prochain et assumer ses choix .Et c'est la que cela risque de coincer: nous avons beaucoup trop de prétendants qui manquent cruellement de sens politique approfondi et qui ne sont pas prêts à soutenir l'offre la plus aboutie pour tous les Français sauf les 1%...Et ces gens sont-ils prêts à mettre leur égo de côté?En tous cas il n'a pas encore compris que les riches ont de tous temps dirigé les sociétés (sauf exceptions qui confirment la règle)

Par titou, le 17/07/2021 à 19h43

Mais d'où parle ce type ?

Par Pascal, le 17/07/2021 à 18h02