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Féministe, bien sûr, mais quel féminisme ?

Aux Sources

Aurore Koechlin et Françoise Vergès

Le féminisme est régulièrement invoqué pour stigmatiser l’Islam, qui serait par nature hostile à l’égalité des sexes, ou pour stigmatiser les classes populaires, qui auraient soi-disant le monopole de la misogynie et de l’homophobie. Laisser le féminisme à celles et ceux qui en font cet usage, qui l’instrumentalisent pour justifier les expéditions impérialistes des Etats occidentaux, et dont l’unique objectif est d’avoir autant de femmes que d’hommes à la tête des entreprises du CAC 40, serait cependant une lourde erreur politique. Il existe un féminisme décolonial et anticapitaliste, qui est aujourd’hui à l’avant-garde de la résistance mondiale au duo infernal du néolibéralisme et de l’extrême-droite. Ce féminisme est inclusif ; il est porté par des femmes racisées, voilées, précaires, handicapées, des travailleuses du sexe, des trans. Et ce féminisme est révolutionnaire ; il place la lutte collective, la grève du travail (productif et reproductif) et l’auto-émancipation au cœur de sa stratégie, sans se faire d’illusions sur la force transformatrice de l’Etat.

Pour en discuter, je reçois dans cette émission deux spécialistes du sujet. Françoise Vergès, historienne et politiste, a publié Un féminisme décolonial (éditions de la Fabrique, 2019), qui réexamine l’histoire du féminisme européen en montrant combien il est resté aveugle à l’esclavage, à la colonisation et à leurs répercussions actuelles. Certaines figures du féminisme mainstream semblent davantage préoccupée par le droits des hommes à importuner les femmes dans le métro que par le sort des milliers de femmes chargées de nettoyer les gares et les rames, travail indispensable à la collectivité et pourtant totalement invisibilisé et exploité. Dans une perspective relativement proche, la sociologue Aurore Koechlin met en lumière, dans La révolution féministe (éditions Amsterdam, 2019), l’émergence d’une quatrième vague du féminisme qui, avec MeToo, Ni Una Menos et la grève du 8 mars, combine le meilleur de la deuxième vague (le souci de construire un mouvement de masse) et le meilleur de la troisième vague (le souci de lutter contre le partriarcat en luttant simultanément contre toutes les formes de domination).

Mais, si définir le féminisme comme décolonial et révolutionnaire constitue une avancée salutaire, cela ne lève pas les difficultés concrètes auxquelles les femmes se trouvent confrontées quand elles luttent. Comment éviter le piège de l’institutionnalisation, qui vide le féminisme de son potentiel subversif, et le piège de la course à la radicalité, qui conduit une poignée de militantes hyperpolitisées à se couper des autres femmes ? Comment surmonter les conflits internes qui empoisonnent la vie d’un collectif en lutte ou d’un espace « safe » ? Comment dénoncer le sexisme des hommes noirs, arabes, ouvriers, sans apporter de l’eau au moulin des préjugés négrophobes, arabophobes et classistes ? Aurore Koechlin et Françoise Vergès se coltinent ces questions compliquées avec une grande intelligence.

Bon visionnage !

Manuel Cervera-Marzal

Aux Sources , émission publiée le 14/09/2019
Durée de l'émission : 89 minutes

Regardez un extrait de l'émission

Commentaires

7 commentaires postés

Au bout de l'emission je comprends très bien la ou en est Francoise Verges et la nécessite d'interrogation plus profonde sur les mécanismes et lacunes des mouvements féministes. En fait on se rend compte que dans toutes les luttes émancipatrices , il manque un vrai travail d'introspection.

Par delphine b, le 01/10/2019 à 22h02

C'était intéressant mais la parole était très inégalement répartie et Françoise Vergès était parfois à la fois confuse et autoritaire dans son expression. Je me suis beaucoup agacé qu'Aurore Koechlin n'ait pas eu davantage la parole.

Par donny frisson, le 17/09/2019 à 15h22

cette émission donne une idée de l'étendu et de la variété des luttes féministes à travers le temps, un menu copieux mais qui, par delà l'explication de tous les types de féminisme, laisse sur sa faim. exemple la "libération" des femmes par le...travail, que c'est poétique!
le visage, le regard et la gestuelle de f verges, ses belles bagues, lui donnent un air de pythie, qu'a koechlin hésite à contredire.

Par luc lefort, le 16/09/2019 à 09h06 ( modifié le 16/09/2019 à 09h28 )

@ Raphaël. J'ai changé de navigateur et là ça fonctionne. Merci !

Par Fred GOT, le 15/09/2019 à 08h17

Bonjour Mesdames et Monsieur,

Je suis contrainte de vous prévenir que mon commentaire sera extrêmement rageur, et absolument pas contre vous ,mais contre le "SYSTÈME" dans son entier, quel qu'il soit et revête l'aspect qu'il a ou qu'on lui suppose,;Le "SYTÈME" n'est ni de droite , ni de gauche , ni du centre , ni libéral ou néolibéral ou collectiviste ou quoi que ce soit, C'EST UN SYSTÈME QUI N'EST NI PLUS NI MOINS, CONSTAMMENT ET SEMPITERNELLEMENT DE QUELLE QUE FAÇON QU'ON SOIT ORGANISÉ UN "SYSTÈME" D'"HOMME" SEULEMENT UN "SYSTÈME" IMAGINÉ SANS ARRÊT PAR L'"HOMME" ! POINT BARRE! ET LE PLUS MONSTRUEUX QUI SOIT !
Voici un copier/coller que j'ai pondu sur Médiapart;

https://blogs.mediapart.fr/charlotte78/blog/020217/resister-au-mal

Catherine Richard ,née le 18/11/1947 à SCHRUNS (Autriche) de père chasseur Alpin et de mère secrètaire de direction Français tous deux en occupation en Autriche après la guerre 39/45.

PRIEZ ET BATTEZ VOUS !

Par Catherine Richard_1, le 15/09/2019 à 06h56

@ Fred GOT. On vient de tester de notre côté et tout fonctionne. Quel type de message avec vous ?

Par Raphaël, le 14/09/2019 à 20h44

Bonjour,
Impossible de télécharger l'audio, si vous pouviez faire qlq chose, merci !

Par Fred GOT, le 14/09/2019 à 20h08