Rosa Luxemburg Reloaded
Aux Sources
Michael Löwy
La première fois que j’ai rencontré Michael Löwy, nous étions en tenues estivales, au bord de la Méditerranée, à l’université d’été du tout jeune Nouveau Parti Anticapitaliste. Je venais à peine de rompre avec la droite catholique de mon enfance, j’avais encore la foi chrétienne chevillée au corps et, pour tout dire, je ne me sentais pas à ma place parmi ces militants révolutionnaires dont les codes et les références m’échappaient largement. Je voulais être des leurs mais je les fantasmais en bouffeurs de curés, au point d’être gêné, véritablement gêné, par le crucifix qui pendait alors à mon cou. De ma longue discussion avec Löwy, dont il n’a peut-être aucun souvenir, je suis pour ma part ressorti profondément soulagé. Que m’avait-il dit ? Une chose simple, qui eut sur moi un effet libérateur : les communistes d’aujourd’hui sont les véritables héritiers des pères fondateurs de l’Eglise. On peut raisonnablement soutenir qu’il existe une affinité élective entre le message du Christ et le projet révolutionnaire.
Huit années plus tard, je retrouve Michael Löwy sur le plateau de Hors-Série, et j’apprends qu’il tient cette idée de Rosa Luxemburg. La révolutionnaire juive polonaise fut assassinée il y a un siècle par des corps-francs (qui constitueront les premiers soutiens de Hitler) au service d’un gouvernement social-démocrate. En France, les commémorations furent quasiment inexistantes. Mais Michael Lowy s’évertue, avec quelques autres, à faire vivre la pensée de Luxemburg. Dans son dernier ouvrage, Rosa Luxemburg, l’étincelle révolutionnaire (Le temps des cerises, 2018), le philosophe franco-brésilien montre l’extraordinaire actualité de cette pensée, qui reste d’une grande utilité pour analyser la vague brune qui emporte en ce moment la moitié des gouvernements de la planète, pour saisir la portée écosocialiste des luttes indigènes en Amérique latine, pour faire une piqûre de rappel à la gauche tentée par le souverainisme ou encore pour se positionner intelligemment à l’égard des gilets jaunes. Bien sûr, Rosa Luxemburg eut aussi ses égarements, en s’opposant par exemple au droit à l’autodétermination des peuples, qu’elle considérait comme une ruse du nationalisme bourgeois.
Cette émission fait d’une pierre deux coups : le détour par le passé ouvre des perspectives d’avenir. Un philosophe passionné met son érudition au service d’une militante passionnante. Il épouse la pensée de celle qu’il cherche à sauver de l’oubli, au grand bénéfice des auditeurs. J’espère que l’émission agitera vos neurones autant qu’elle a égayé les miens.
Bon visionnage !
Manuel Cervera-Marzal
Commentaires
4 commentaires postés
@ titou
merci pour cet article de "reporterre" sur g thunberg, ça relativise le style de son émergence médiatique...purement bucolique!
Par luc lefort, le 10/02/2019 à 11h16
@ Luc Lefort
Au sujet de la jeune suédoise , peut-être pourriez-vous lire l'article qu'Isabelle Attard lui consacre sur REPORTERRE.
Le Capitalisme mène l'humanité à sa perte en. sachant déguiser ses prédations avec l'aide du moule intellectuel imposé par 99,99% des médias qui préfèrent tout plutôt que l'écosocialisme.
Par titou, le 09/02/2019 à 19h49
Bonjour à tous deux,
Par Catherine Richard_1, le 09/02/2019 à 18h01
le communisme primitif est pensable auprès de groupes d'individus peu nombreux, et proches de la nature. dans les fourmilières humaines que sont les grands centres urbains, ça parait beaucoup plus compliqué a réaliser. le dernier livre de r vaneigem: "contribution à l'émergence de territoires libérés de l'emprise étatique et marchande" creuse la réflexion.
le tout nouveau mouvement écologiste initié par une jeune suédoise de 16 ans, qui veut contraindre les gouvernements à prendre des mesures radicales pour essayer de sauver la population humaine, de la catastrophe écologique annoncée, me parait le genre de mouvement le plus efficace, contre tous les gouvernements d'extrème droite qui pullulent. "la panique identitaire" de ceux -ci, subvertie et pulvérisée, par la fraternité internationaliste des jeunes générations, des pays riches en particuliers, très lucides sur notre responsabilité historique dans la prédation irrépressible de cette planète.
Par luc lefort, le 09/02/2019 à 15h26