A bas la presse bourgeoise !
Aux Sources
Dominique Pinsolle
La critique des médias constitue presque un sport national. 70% des Français ne font pas confiance à la presse. Mais cette méfiance généralisée procède de motivations multiples et même contradictoires. Libéraux, fascistes, complotistes, communistes, etc… Chacun déploie son arsenal de griefs. Quel est alors le propre de la critique anticapitaliste des médias ? Pour en discuter, je reçois aujourd’hui Dominique Pinsolle, historien du mouvement ouvrier et collaborateur régulier du Monde diplomatique. Son dernier livre, récemment publié chez Agone, s’intitule : A bas la presse bourgeoise ! Deux siècles de critique anticapitaliste des médias.
Telle que l'histoire est généralement racontée, la liberté de la presse est associée au recul de l'Etat : loi de 1881 mettant fin au cautionnement et à l'autorisation préalable, démantèlement de l'ORTF dans les années 1970, libéralisation et privatisation de l'audiovisuel dans les années 1980. Le souci, avec cette version des faits, c'est qu'elle assimile la liberté de la presse à la liberté des patrons, passant ainsi sous silence l'action d'une foultitude d'intellectuels, de syndicalistes, de militants et d'anonymes qui, durant deux siècles, luttèrent contre l'accaparement des médias par une minorité fortunée. Se plonger dans cette histoire, c’est aussi, pour la gauche, soulever toute une série de questions trop rarement abordées, telles que le recrutement social des journalistes, les dispositifs anti-concentration, le statut juridique des rédactions, et même la création « service public » de la presse qui mutualiserait l’infrastructure matérielle de fabrication, d’administration et de distribution des journaux.
Bon visionnage !
Manuel Cervera-Marzal