Hors-Série
Arret sur Images
Me connecter
abonnez-vous


Carte blanche : l'Etat contre les étrangers

Aux Ressources

Karine Parrot

Voilà un sujet qui brillait par son absence sur notre site. Plus de 30 000 exilés morts en tentant de traverser la Méditerranée depuis quinze ans et pas une seule émission consacrée à la supposée « crise migratoire », et à la véritable « crise de l’accueil ». Pour ma part, je dois reconnaître avoir été rebutée par une question si souvent parasitée par des postures d’indignation à géométrie variable.

Le livre de Karine Parrot m’a réconcilié avec le sujet. Dans Carte blanche, l’Etat contre les étrangers ( La Fabrique ), elle expose méthodiquement les différentes armes de la guerre que mène la France depuis une vingtaine d'années non seulement contre les immigrés illégaux, mais aussi contre ceux qui devraient théoriquement bénéficier d'un statut protecteur, tels que les demandeurs d’asile et les mineurs isolés.

C’est avec l’engagement d’une militante du GISTI ( groupe d’information et de soutien aux immigré.e.s) et la compétence d’une professeure de droit, que Karine Parrot décortique les dispositifs conçus par les gouvernements successifs pour tenter d'empêcher les étrangers pauvres de poser le pied en France et — lorsqu’ils traversent la frontière quand même — pour les « inciter » à repartir.

Elle explique notamment comment des outils de la police judiciaire tels que la garde à vue et la rétention ont été détournés par l'administration, mais aussi comment les lois servent plus souvent à conférer un semblant de cadre aux pratiques policières les plus arbitraires et brutales qu’à renforcer les droits des étrangers. Dans notre mal nommé « Etat de droit », l’exécutif, quasiment affranchi de toute contrainte légale digne de ce nom, a en effet toute latitude pour faire le « sale boulot » : trier, contrôler, précariser mais aussi arrêter, enfermer, détruire, humilier, expulser.

Laura RAIM

Aux Ressources , émission publiée le 01/06/2019
Durée de l'émission : 79 minutes

Regardez un extrait de l'émission

Commentaires

9 commentaires postés

Remarcable!
Pour ceux qui veulent aller plus loin, voici une conferece gesticulée sur le meme theme: https://www.youtube.com/watch?v=xb5SDoS08-A&list=WL&index=23

Par Andredge, le 27/11/2019 à 12h02

Excellent entretien. Au passage qui évoque les européens qui n'ont pas besoin de visas pour entrer en France, il y avait l'opportunité d'évoquer la situation des Roms. Beaucoup pensent qu'ils sont en situation irrégulière mais ce n'est pas le cas et leur sort n'est pas plus enviable que celui des étrangers hors Schengen. Merci encore pour ce salutaire exposé.

Par irene cerquetti, le 14/06/2019 à 08h22

Laura Raïm, cet entretien est absolument formidable. Je veux dire par là que j'ai trouvé formidable de le regarder. Bien sur, la réalité exposée n'est pas du tout formidable, elle est affreuse. Il était salvateur que je regarde cet entretien aujourd'hui. C'est ça qui est formidable. C'est un immense merci. Parce qu'en fait je me dis que je n'ai rien appris, finalement. Vous m'avez fait désoublier. Merci.

Par Rémi Gendarme, le 10/06/2019 à 13h12

Merci, Karine Parrot montre bien comment, malgré un vernis juridique bien lisse et bien glacé, tout cela fait système pour se débarrasser méthodiquement de ces personnes réfugiées.

Par Fred GOT, le 03/06/2019 à 01h19

la carte d'identité en France est gratuite alors que pour une grande partie des terriens s'en faire faire une est trop dispendieux...tant qu'il y aura une telle disparité de conditions économiques entre pays riches et pays pauvres, "les flux migratoires" vont prospérer, quelques soient les méthodes administratives pour les "gérer".
la liberté de circulation et d'installation que prône k Parrot, est une belle utopie, comme le revenu inconditionnel pour chaque être humain.
par ailleurs, que la république refuse la nationalité ou le long séjour à des croyants fanatisés, musulmans ou autres, n'est pas du "racisme d'état", mais la limite pour une collectivité fraternelle.
le constat est sombre quant à la situation des étrangers en France, il reste l'espoir comme dans la chanson de Mouloudji: "mon pote le gitan".

Par luc lefort, le 02/06/2019 à 09h03

Excellente émission.

Par theztul, le 01/06/2019 à 22h35

ce n'est pas une "crise de l'immigration" mais une crise de l’accueil !...Quand des lois liberticides transforment les travailleurs immigrés en clandestins, destinés à remplir les charters de la honte, comment ne pas évoquer la Commune de 1871 qui accueillait dans ses rangs des travailleurs luxembourgeois, belges, italiens, qui confiait l’équivalent du premier ministère du travail à un ouvrier hongrois et le commandement de ses armées à deux généraux polonais ?...http://www.commune1871.org/

Par morvandiaux, le 01/06/2019 à 17h28 ( modifié le 01/06/2019 à 17h44 )

Reste que la description de l'inhumanité et de l'absurdité sans nom de la machine administrative à trier mais surtout à exclure est implacable.

Dès lors, y a-t-il une autre solution que la liberté d'installation ?



Par Vincent Fournier, le 01/06/2019 à 15h31

Intéressants rappels historiques sur la construction (fluctuante) de la notion de citoyenneté / francité / nationalité.

Il aurait été utile de rappeler la définition de la citoyenneté de la Constitution du 24 juin 1793, chère à Frédéric Lordon : " Tout homme né et domicilié en France, âgé de 21 ans accomplis ; tout étranger âgé de 21 ans accomplis, qui, domicilié en France depuis une année, y vit de son travail, ou acquiert une propriété, ou épouse une Française, ou adopte un enfant, ou nourrit un vieillard ; tout étranger enfin, qui sera jugé par le Corps législatif avoir bien mérité de l'humanité ; est admis à l'exercice des Droits de citoyen français."

Cependant j'aurais vraiment aimé que Karine Parrot réponde sans botter en touche aux "objections" de Laura Raim qui me paraissent légitimes quant à la légitimité (ou non) d'un contrôle démocratique des flux migratoires. Cette question me paraît essentielle. Et à ma connaissance, aucun Etat au monde (y compris le "gentil" Canada) n'exerce aucun contrôle des flux migratoires sur son territoire.

Par Vincent Fournier, le 01/06/2019 à 14h54