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Pour un suicide des intellectuels

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Manuel Cervera-Marzal

Je ne sais pas s'il vous est déjà arrivé, lorsque vous étiez lycéen(ne) et désespéré(e), de pousser la porte du conseiller d'orientation, à la recherche d'une idée pour éclairer le trou noir que semblait être votre avenir professionnel. J'imagine que si c'est le cas, il est peu probable que vous soyez ressortis du bureau de M.Lamotte ou de Mme Givron avec l'idée de devenir intellectuel. Et c'est bien dommage. Auriez vous été informé du succès de la filière et de tous les avantages dont bénéficiaient les membres de cette profession, vous auriez signé des deux mains!

"Intellectuel" est une profession qui consiste, pour le dire vite, à être payé pour "produire des idées". Son rôle, sa fonction, sa légitimité et son utilité sociale ont été les thèmes de nombreux ouvrages et l'occasion d'encore plus nombreux débats et polémiques, plus ou moins productifs ou intéressants. Sans vouloir dénigrer les protagonistes des  débats les plus récents, on pourrait, sans exagérer, être amené à penser qu'ils occupent un peu trop d'espace dans ce qu'on appelle le "débat public" (avec toutes les réserves dues à ce terme).

Manuel Cervera-Marzal publie Pour un suicide des Intellectuels dans un contexte, disons, de trop plein "d'intellectuels" ou plus précisément d'egos d'intellectuels. Sa proposition peut donc paraître tout à fait séduisante. L'idée d'un monde où l'on aurait moins de temps de cerveau occupé par les tweets des intellectuels a quelque chose de réjouissant. Il n'est sans doute pas inutile de la considérer.

Il précise (assez tôt) dans le texte qu'il ne demande pas la disparition physique des intellectuels mais leur élimination en tant que catégorie à part, jouissant de privilèges sociaux, politiques et économiques qui les séparent du reste du monde.  Il s'agit pour lui de faire une critique de ces privilèges et de permettre, en démocratisant radicalement l'accès à cette profession, d'aboutir à une multiplication du nombre d'intellectuels utopiques et une redistribution radicale des tâches de réflexion et d'exécution. Il serait sans doute intéressant de voir quel effet produirait cette redistribution des tâches sur certains de nos plus brillants esprits.

Manuel Cervera-Marzal  Pour un suicide des intellectuels Textuel 2016

 

 

 

 

 

En accès libre , émission publiée le 06/02/2016
Durée de l'émission : 58 minutes

Regardez un extrait de l'émission

Commentaires

13 commentaires postés

empowerment = émancipation

Par lalberio, le 06/03/2016 à 21h40

Une fin un peu désespérante : l'engagement des intellectuels appelant à l'engagement est conditionné par leur souci d'avoir un salaire ? La sécurité de l'emploi ? Un statut d'universitaire ?

Par Faab, le 22/02/2016 à 23h06

Bonjour Maja Neskovic,
je n'arrive pas à recevoir votre émission ni la télécharger , pourtant je suis abonné à " Hors série " contact@ierretual.com

j'ai un Imac OSX 10.6.68

Merci

Pierre Tual

Par Pierre Tual, le 21/02/2016 à 11h29

Je vais peut-être m'exprimer un peu vulgairement mais c'est comme cela que mon impression sur cet entretien est née dans mon esprit : ça pisse quand même pas bien loin...

Par Alain Godet, le 20/02/2016 à 16h31

@Robert
ça m'a fait le même effet
mais ce qui est intéressant est dans les 20 dernières minutes

Sinon l'émission est du 6 février et dernier édito en 2014 ?
ça serait bien d'avoir l'équivalent de Chez Nous d'@si

Par jck, le 18/02/2016 à 14h46

J'en suis à moins de 20 minutes mais je n'ai entendu que des banalités. J'arrête.

Par Robert., le 13/02/2016 à 18h36

Vivekananda 1895:
"Des nombreuses énigmes qui, sous tous les climats et en tous temps, ont troublé l'intellect de l'homme, la plus complexe est lui-même. Des myriades de mystères qui depuis l'aube de l'histoire ont appelé toutes ses énergies à se démener pour trouver une solution, la plus mystérieuse est sa propre nature. C'est à la fois l'énigme la plus insoluble et le problème de tous les problèmes. Comme point de départ et dépôt de tout ce que nous connaissons, ressentons et faisons, il n'y jamais eu et il n'y aura jamais d'époque où la propre nature de l'homme cessera de réclamer sa première et meilleure attention.

[...]

Adoptant une vue partiale, superficielle et pleine de préjugés sur les milieux et des détails non essentiels, dégoûtés aussi quelquefois du manque de netteté de nombreuses écoles et de nombreuses sectes, et souvent, hélas, conduits à l'extrême opposé par les superstitions violentes d'une prêtrise organisée, les hommes n'ont pas manqué, particulièrement parmi les intellects avancés, dans les temps anciens et modernes, non seulement d' abandonner leur recherche avec désespoir, mais de la déclarer vaine et inutile. Les philosophes peuvent s'inquiéter et ricaner et les prêtres exercer leur commerce même à la pointe de l'épée, mais la vérité ne vient qu'à ceux qui adorent dans son temple et le font seulement par amour pour elle, sans peur et sans négoce.

La lumière parvient aux individus au travers des efforts conscients de leur intellect; elle parvient, bien que doucement, à la race entière au travers de pressions inconscientes. Les philosophes laissent voir les luttes volontaires des grands esprits; l'histoire révèle le processus silencieux d'infiltration par lequel la vérité est absorbée par les masses."

http://gaurakrishna.org/Traductions/Swami%20Vivekananda.pdf

En Version Original :
"Of the many riddles that have perplexed the intellect of man in all climes and times, the most intricate is himself. Of the myriad mysteries that have called forth his energies to struggle for solution, from the very dawn of history, the most mysterious is his own nature. It is at once the most insoluble enigma and the problem of all problems. As the starting-point and the repository of all we know and feel and do, there never has been, nor will be, a time when man’s own nature will cease to demand his best and foremost attention.
Though thru hunger after that truth, which of all others has the most intimate connection with his very existence; though through an all-absorbing desire for an inward standard by which to measure the outward universe; though through the absolute and inherent necessity of finding a fixed point in a universe of change, man has sometimes clutched at handfuls of dust for gold, and even when urged by a voice higher than reason or intellect he has many times failed rightly to interpret the real meaning of the divinity within—still, there never was a time since the search began when some race, or some individuals, did not hold aloft the lamp of truth.
Taking a one-sided cursory and prejudiced view of the surroundings and the unessential details, sometimes disgusted also with the vagueness of many schools and sects, and often, alas! driven to the opposite extreme by the violent superstitions of organized priestcraft—men have not been wanting, especially among advanced intellects, in either ancient or modern times, who not only gave up the search in despair, but declared it fruitless and useless. Philosophers might fret and sneer, and priests ply their trade even at the point of the sword; but Truth comes to those alone who worship at Her shrine for Her sake only, without fear and without shop-keeping.
Light comes to individuals through the conscious efforts of their intellect; it comes slowly, though, to the whole race, through unconscious percolations. The philosophers show the volitional struggles of great minds: history reveals the silent process of permeation through which Truth is absorbed by the masses."

Par Gauthier R, le 13/02/2016 à 11h35 ( modifié le 13/02/2016 à 12h00 )

Cher Jérôme
Pardonnez moi je suis confuse et honteuse!
En plus, je me suis rendue compte assez vite que c'était vraiment pourri comme opposition puisque dans les deux cas on travaille la matière pour créer une pièce et que l'une comme l'autre était des activités assez fascinantes à observer (c'est comme un tour de potier, je peux regarder ça pendant des heures!). Encore toutes mes excuses...

Bien à vous
Maja

Par Maja, le 12/02/2016 à 16h15

Bonjour,
juste un petit grincement de dents quand vous avez comparé ébéniste et tourneur fraiseur au bénéfice du premier.
Ça mis à part je n'ai que des compliments pour l'ensemble des contenus de votre site, c'en est désespérant.
Encore merci pour les versions audio supères ( je réforme l'orthographe si je veux ! ) pratiques pour les longues journées d'usine et l'écossage des petits pois.
Jérôme.

Par Jérôme CHEVALIER, le 12/02/2016 à 12h03

Je le pense à chaque émission de HS visualisée et là je l'écris : MERCI!

Et hop j'offre un abonnement à mon beauf (façon de partager déjà testée).

Par KleeMz, le 08/02/2016 à 14h50

lumineux!quel espace de respiration cet entretien. Enfin une parole noyée par le discours conformiste qui sort la tête de l'eau; merci Hors séries" émission que la raison devrait programmer sur une grande chaine publique à 20h30.
Une frustration, comment le communiquer à des gens (mes amis) qui sont pré-ouverts à cette radicalisation non-excessive (peut-être des futurs hors sérinautes?)

Par Maunoir Charbonnel, le 08/02/2016 à 11h27

Au sujet de l'obsolescence programmée, il me semble qu'il est préférable de rester prudent. Là où certains voient de la malveillance, il y a généralement un calcul économique plus trivial. Un produit conçu pour durer 5 ans ne coûte pas le même prix à produire (et donc pour le client) qu'un produit conçu pour durer 10 ans. L'exemple de l'ampoule à incandescence est souvent cité comme symbole du complot de l'obsolescence programmée. Il semblerait en fait que les entreprises du secteur se soient accordées pour qu'à une puissance en Watt corresponde un éclairement en Lumen ce qui permet au consommateur de s'y retrouver. Comme il semble qu'il y ait un lien physique entre éclairement, consommation et durée de vie, en augmentant l'éclairement de certaines ampoules pour les rendre homogènes avec les autres ampoules de même puissance, on a fait nécessairement baisser leur durée de vie. Il existe bien des ampoules increvables. C'est juste qu'elles n'éclairent pas grand-chose.

Maintenant, produire des objets plus robustes qui durent plus longtemps et qui sont donc plus chers est sans doute la voie à suivre (pas seulement pour travailler moins, mais pour consommer moins, bref pour être globalement plus efficient). Mais cela passe par une inflexion du désir de nouveautés (voir le déclin de la Ford T, véhicule incassable qui s'est fait complètement dépasser par des véhicules moins chers, bien moins robustes, mais sans cesse renouvelés).

Par SirDeck, le 06/02/2016 à 21h13

il aurait été intéressant d'aborder l'écart entre le travail prescrit et le travail concret : faire ressortir auprès de certains "intellectuels" que le travail dit manuel est de plus en plus entravé dans sa créativité, ses capacités d'initiatives, bref...que la partie intellectuelle du travail dit "manuel" se rétrécit...que le travail "que" manuel n'existe pas et la "prolétarisation" globale au sens de Roland Gori touche l'ensemble des salarié(e)s, les normes, les protocoles sont le lot de tout le monde ?? le travail "robotisé" n'est que l'avant-garde de la "robotisation" ??
ce ne sont que des questions....

Par morvandiaux, le 06/02/2016 à 19h18